Nous découvrons dans le texte de cette semainne, dans la bouche du prophète, la métaphore de la fidélité. Le défi de parler de manière significative, articulée et intelligible de l’Eternel, la difficulté de parler de l’Ineffable et complètement Autre, se profile devant chaque Prophète. Un outil central dans cette tâche, la métaphore, cherche à jeter une lumière utile sur notre relation avec l’Eternel – elle-même une métaphore – en l’alignant avec d’autres que nous avons.
Cette recherche du familier comme moyen d’assimiler de nouvelles expériences se manifeste dans la vie quotidienne. Les gens confrontés à l’entièrement nouveau, géographique, social, physique, ou culturel, diront souvent, «C’est comme … » ou «C’est tellement différent de … » Nous comprenons le nouveau en le comparant et en contrastant – à travers des questions – à ce que nous croyons déjà bien savoir.
Dans notre haftarah, la métaphore est le mariage (dans le style ce serait les épousailles), en particulier la fidélité des partenaires quand tout se construit dans le bien, puis par la trahison des conjoints qui trichent, et puis la volonté de certains conjoints de prendre un partenaire capricieux créant ainsi de grands dommages à la relation.
L’ouverture, qui nous relie à la lecture de la Torah, a Osée invoquant le service de Jacob pour gagner Rachel comme un parallèle à l’Eternel ayant libéré les Hébreux d’Egypte avec un prophète, tout en veillant sur eux. Tout comme Jacob a travaillé résolument pour atteindre son but (épouser Rachel, celle qu’il aime), n’abandonnant jamais, malgré les divers défis mis en place par le futur beau-père Lavan, l’Eternel travaille métaphoriquement résolument sur la relation qu’Il entretient avec nous.
L’effort continu est une manière d’être fidèle à un but, mais la haftarah implique et suggère d’autres chemins. Jacob doit fuir son frère Ésau pour se rendre à Haran, c’est une retraite stratégique et appropriée aux circonstances. Quitter la scène, comme nous enseignent les actions de Jacob, est parfois la seule façon d’être en mesure d’aller de l’avant vers un but.
Tout comme le mouvement continu vers l’avant est parfois impossible, la punition divine, qui peut sembler une perturbation de notre relation, n’a même pas à signifier que c’est une rupture dans l’engagement divin continu. Quand Éphraïm encoure des représailles ici, l’Eternel paraît prendre la forme de divers animaux – un lion, un ours – en les attaquant et en les punissant. La punition fait mal…..Pourtant il y a le réconfort de la profonde implication divine dans son administration.
Passer de la punition à l’implication
Le haftarah enregistre la tentative d’Osée de convaincre le peuple de revenir à une version plus positive de cette implication profonde. Ephraïm, probablement le Royaume du Nord, était à un moment très fidèle. La lecture traditionnelle du texte nous fait voir le roi Jéroboam comme ayant reçu le Royaume du Nord car il avait critiqué le fait que le roi Salomon avait dormi longtemps le jour de la consécration du Temple (et donc est arrivé très tard pour la cérémonie). Le Midrash dépeint l’Eternel comme le récompensant pour son zèle ou le mettant au défi de surpasser Salomon. Quoi qu’il en soit, Jéroboam a échoué lamentablement, l’attrait du pouvoir l’incitant à établir un culte concurrent à celui du Temple.
C’est dans le film, ou le livre « Love Story » qu’apparaît la célèbre affirmation que l’amour signifie ne jamais avoir à dire que vous êtes désolé. Bien que je pense généralement que le contraire soit vrai – ce sont précisément ceux que nous aimons le plus auprès de qui nous devrions nous excuser le plus, et avec sincérité – la déclaration souligne à juste titre que l’amour ne peut pas dépendre de la qualité des excuses. L’amour peut être brisé, mais pas à cause d’une excuse. Les excuses peuvent, cependant, améliorer la relation, en la portant au niveau suivant où elle est censé être.
Avec l’Eternel, l’équivalent de dire « désolé », c’est le regret puis le repentir, (la ‘harata et puis la techouva) de sorte que l’appel du prophète pour le repentir s’inscrit bien ici. Dans une relation bénie de permanence mais en proie à l’incapacité ou au refus d’un partenaire d’assumer ses responsabilités, le seul obstacle à l’amélioration est la volonté de ce partenaire de reconnaître l’erreur et de se consacrer de nouveau à la réalisation de la promesse. inhérente à la relation. Comme Jacob a contribué à la permanence et l’effort pour perfectionner sa relation avec Rachel, nous sommes appelés à le faire avec l’Eternel (Qui est déjà réciproque).
Maïmonide commentant ces versets célèbres 13:8 se réfère à l’Eternel qui nous punit en agissant envers nous en tant qu’«ours endeuillé de ses petits». Dans son commentaire là-bas, Maimonide note que peu de gens manquent complètement de qualités intellectuelles et de caractère, mais toute personne si dépourvue d’humanité serait semblable à un animal rampant, et peut être mentionné de cette façon. Cela soulève la possibilité que Maïmonide aurait pu interpréter notre verset comme signifiant que l’Eternel nous punira en nous forçant à nous attaquer à de telles personnes, une tâche terrible et un fardeau.
Le verset le plus célèbre dans la haftarah, 14:2, «Retourne O Israël vers le Seigneur ton Dieu», souligne le pouvoir de repentir de renouveler pleinement (et même améliorer) la relation avec l’Eternel. Maïmonide, dans ses Lois du Repentance 7:6, fait écho à ces messages lorsqu’il parle de la proximité du repentir qui amène le pénitent à l’Eternel.
Le verset 14:4 nous dit qu’à l’avenir nous ne dirons plus «Dieu à l’œuvre de nos mains ».
Le verset final de la haftarah, que Maïmonide ne cite pas, nous interpelle en affirmant que les voies divines sont productives pour les justes et destructrices pour les pécheurs. Nous avons tendance à supposer que le bien est toujours bon, mais le verset perçoit les voies divines comme plus malléables.
Dans le Talmud, Baba Batra 89b, on raconte que «En ce qui concerne toutes ces [pratiques pointues des commerçants], R. Johanan ben Zakkai a dit: «Malheur à moi si je devais parler [de ces pratiques]; malheur à moi si je ne dois pas en parler. Si j’en parle, les fripons pourraient les apprendre ; et si je ne parle pas, les fripons pourraient dire: «Les érudits ne sont pas familiers avec nos pratiques» [et nous tromperont encore plus]. La question a été soulevée : [R. Johanan] a-t-il parlé [de ces pratiques pointues] ou non? R. Samuel fils de R. Isaac a dit: Il a parlé [d’eux]; et ce faisant [il a fondé sa décision] sur notre verset : «Car les voies du Seigneur ont raison, et les justes marchent en eux ; mais les transgresseurs y trébuchent.»
Dans une autre page talmudique, Horayot 10b, on suppose que le verset se réfère à la façon dont le mobile affecte un acte; des motifs positifs peuvent en faire un motif méritoire et des motifs négatifs peuvent le rendre pécheur.
Les sources partagent la conviction que certaines actions ne sont pas intrinsèquement bonnes ou mauvaises, mais dépendent de leurs utilisations.
En fin de compte le livre d’Osée et notre haftarah, nous rappellent, de façon déconcertante, que notre justice interne affecte nécessairement notre expérience extérieure de la «religion» et l’impact qu’elle a sur nous. Cette lecture «subjective» est aussi source de confusions et de divisions !!!!
En résumé, Osée utilise donc la métaphore du mariage et de la fidélité pour déplorer les trahisons de l’Eternel faites par les Juifs de son temps. L’Eternel, d’autre part, est dépeint comme punissant, tout en restant toujours impliqué, car l’appel à la techouva est toujours possible. L’implication semble indiquer que nous sommes avertis de la punition, et est appelée à correspondre à la fidélité de Jacob à Rachel.
Rabbi Michel Liebermann