Alain, Laura et Serge SAHIN
Dimanche 13 septembre dernier, nous avons eu le plaisir de visionner en avant-première le film/documentaire de Laura Sahin “Un jour, nous reviendrons voir Alger” qui sera diffusé sur France 3 le 2 novembre prochain.
Ce film est très beau, et extrêmement émouvant, encore plus pour tous ceux qui connaissaient Robert, qui nous a quitté juste après le tournage.
Voici le discours de Samuel Ben-Hamou, président de l’ULIF Marseille prononcer avant la projection :
LES FRERES SAHIN LE RETOUR
Les juifs d’Algérie étaient 130 000 en 1940,
Ils sont devenus Français grâce au décret Crémieux de 1870.
Maîtrisant parfaitement l’arabe et entretenant des liens privilégiés avec les musulmans, ils étaient le lien que les colons n’ont jamais su tisser avec la population arabo-berbère.
Le récit national algérien a le plus souvent été conçu, au cours des dernières décennies, sur un mode restrictif, voire exclusif.
Construit dans la douleur, par la déchirure nécessaire avec le corps du colonisateur, la nouvelle identité algérienne s’est rapidement articulée, en les essentialisant souvent, autour de l’arabité et de la religion.
Ce retour était encore impensable il y a quelques années !!
Le paradigme identitaire algérien qui s’est hélas répandu dans les manuels scolaires en biberonnant des générations d’Algériens fut celui d’une Algérie arabe et musulmane, arabe parce que musulmane, musulmane parce qu’arabe.
Il faut comprendre, au sortir de la guerre d’indépendance, la genèse de cette histoire Algérienne et la nécessité, après les affres de la colonisation, d’inventer une identité nationale solide, dans un contexte puissamment influencé par le nationalisme arabe.
De même, l’arabité et l’islam sont des constituants majeurs, à bien des égards structurants, de l’imaginaire algérien, du précipité culturel national.
Mais il n’y a pas que cela.
L’Algérie est berbère, arabe, africaine, méditerranéenne.
L’Algérie est la terre nourricière de musulmans qui forment une majorité, mais aussi d’athées, de juifs, de chrétiens, dont certains, il ne faut pas l’oublier, ont versé leur sang pour la faire vivre ou pour la libérer.
L’Algérie est la mère de tous ceux-là, par-delà les turpitudes de l’histoire.
Par-delà les constructions rigides, politiques, idéologiques, qui ont été façonnées après la guerre.
Par-delà aussi les influences religieuses, dogmatiques, qui viennent du Golfe et ont largement contribué, ces dernières années, à la bigoterie ambiante.
Certains sont retournés.
ALain, Robert et Serge SAHIN ont eu ce courage et cette volonté sous l’initiative de leur fille et nièce Laura.
Ils ont quitté l’Algérie il y a 58 ans, mais ils se souviennent encore et ils ont voulu renoué avec ce passé avec leur enfance.
Cinquante -huit ans, dans l’histoire, c’est peu.
Mais pour un homme, c’est beaucoup.
L’Algérie qu’ils ont retrouvée est une autre Algérie, mais pour eux, c’est toujours l’Algérie,
La terre de leur enfance, Celle de leurs souvenirs heureux
La terre, l’air qu’on respire, la musique, les traditions sont des choses immuables.
La mer qui fait des vagues sur les rives algériennes a la même odeur qu’autrefois, la couleur du ciel n’a pas changé.
Ce sont les hommes qui changent, malheureusement…
En bruit de fond la guerre et la séparation…peut être
Ils étaient enfants ou adolescents et n’ont peut-être pas compris ce dont il relevait
Ils se souviennent de leur départ, de leurs parents qui parlaient à voix basse, de leurs craintes et l’idée du départ.
Mais ces souvenirs sont aussi joyeux, visuels, colorés, sensuels.
Ils nous racontent la douceur du vivre ensemble, les départs à la plage en été, le cinéma du quartier où passaient les westerns américains, la saveur des plats et le bonheur des fêtes.
Ces scènes, ces images révèlent les relations entre les différentes communautés, à la fois proches et séparées.
Entre l’arabe quotidien et le français de la république et de l’école publique et l’hébreu des rabbins de l’école talmudique, la clameur des rues juives et l’attirante modernité du quartier européen, une histoire humaine se lit dans l’épaisseur de leur vécu à tous les trois
Merci Alain, Serge, Robert et Laura pour ce moment
Samuel BENHAMOU
President ULIF Marseille.
Samuel Ben-Hamou et Laura Sahin