La Paracha de cette semaine présente l’un des incidents les plus déroutants de toute la Torah. Les enfants d’Israël errent depuis 40 ans dans le désert et ils ont soif. Alors l’Eternel dit à Moïse de parler au rocher et l’eau viendra (Nombres 20:8). L’instruction de “parler” au rocher est en contraste avec 40 ans plus tôt, quand Moïse a suivi l’instruction divine de FRAPPER le rocher – et l’eau jaillit (Exode 17:6). Cette fois, Moïse doit parler. Pourtant, il frappe à nouveau le rocher. Rien ne se passe, alors Moïse frappe le rocher une deuxième fois, et l’eau sort. Réponse de Dieu : «Puisque tu as frappé le rocher plutôt que de lui parler, tu ne conduiras pas le peuple dans la Terre d’Israël » (Nombres 20:11-12).
La Torah investit beaucoup de valeur dans le pouvoir de la parole. Bien que nous lisons dans Pirkei Avot que “les mots prononcés ne sont pas aussi importants que les actes accomplis, »: la Torah souligne néanmoins constamment l’importance de la parole. Les paroles inappropriées, la calomnie et l’obscénité sont de terribles abus du don de la parole, le lachone hara en fait partie. La Torah évalue la parole comme étant la seule qualité qui sépare vraiment les humains du règne animal ( même si les animaux ont leurs codes de communication). La parole peut consoler, réconforter, conseiller, persuader et informer. C’est la principale méthode d’éducation et de communication avec les autres. La parole peut être sainte et peut conduire à la réconciliation, au compromis et à la compréhension entre les humains, même parmi les anciens ennemis. D’autre part, la force, même lorsqu’elle est justifiée et nécessaire, règle rarement les choses ou augmente la compréhension et la sagesse.
La force ne doit être employée que si la parole échoue. La Torah nous dit que même en temps de guerre, l’armée des enfants d’Israël entrant en Terre d’Israël était “d’appeler à faire la paix avec ses ennemis» avant de se lancer dans une action militaire. Bien sûr, la parole n’est pas un gagnant infaillible tout le temps et sans un recours à la force ou une menace de force, la sécurité et le progrès ne peuvent pas se produire dans un monde complexe et dangereux comme le nôtre. Mais la ligne attribuée à W. Churchill au sujet de l’ONU – “It is better to jaw, jaw, jaw than to war, war, war”,“Il vaut mieux mâchoire, mâchoire, mâchoire que de la guerre, la guerre, la guerre » – conserve certainement sa place dans les truismes de l’histoire.
Moïse admet au début de sa mission de diriger le peuple d’Israël que, dans son tempérament et même physiquement, il n’est pas une personne maniant bien parole. Pourtant, ses plus grands succès et réalisations se produisent quand il suit le commandement du Seigneur et quand il parle au peuple d’Israël et à Pharaon.
Moïse n’est pas seulement celui qui apporte la Torah écrite à Israël, mais il est également appelé «rabénocu », notre maître professeur, cette fois-ci, de la loi orale – il passe les 40 dernières années de sa vie à parler, enseigner, expliquer et guider. La raison pour laquelle il a été puni d’avoir frappé le rocher dans la colère afin de faire sortir ses eaux plutôt que d’adhérer aux instructions divines dbne parler au rocher. En frappant le rocher et en ne essayant pas d’abord de lui parler, Moïse privilégie indirectement la force au détriment de la parole, et le pouvoir sur la persuasion, dans l’esprit de ses disciples et de l’assemblée d’Israël. Frapper le rocher est l’antithèse de tout ce que Moïse avait enseigné et démontré jusqu’à présent. Certainement frapper le rocher permettrait d’obtenir un succès immédiat – l’eau s’écoule de celui- ci. Mais l’Eternel dit à Moïse que frapper le rocher ne sanctifie, ni le peuple d’Israël ni son Dieu. Il peut sembler être une solution rapide au problème, mais ce n’est certainement pas une leçon durable de moralité et un comportement saint. Frapper le rocher et ne pas lui parler est ce qui apportait les espoirs de Moïse de conduire Israël sur la Terre Promise, et cela l’a amener à l’échec.
La capacité de parler sagement au bon moment est toujours l’un des grands talents des êtres humains. Nous devrions tous essayer de le cultiver et de l’utiliser régulièrement dans notre vie personnelle, familiale et communautaire.
Rabbi Michel Liebermann